••• C'était supposé n'être qu'un receuil d'amuse-gueules, sorte de pré-échos d'albums à venir. Pour devenir finalement l'un de mes albums les plus importants, sinon le plus important pour beaucoup.

••• Les choses étaient assez simples: j'y prévoyais des morceaux d'inspiration africaine, jazz et romantique. Histoire de montrer l'étendue de mes palettes. Et sur l'insistance de Chris Blackwell, je l'ai gardé instrumental, un véritable divorce de ce que j'avais cru entamer chez Barclay.

."... Dans quel bac faut-il le mettre ? ..."

••• Bien avant d'entrer en production, je savais exactement comment le faire sonner: une sorte de bande originale d'un voyage imaginaire d'un petit garçon autour du monde. D'où les fondus-enchaînés entre les morceaux, chose dont je rêvais depuis "Talking Book" et "Innervisions" de Stevie Wonder. Lors d'un voyage à Nassau, Chris m'a fait entendre le "Duck Rock" de Malcom McLaren réalisé par Trevor Horn, dont la dynamique et l'éclectisme ont achevé de me convaincre de la pertinence de mes objectifs. Je n'avais plus qu'à m'appliquer sur le choix des titres, à l'écoute de mes maquettes.

••• La plupart d'entre elles n'étaient, comme d'habitude, rien d'autre que des amorces, des 'pierres d'attente', qu'il ne me restait plus qu'à développer et/ou combiner afin de leur insuffler du sens le moment venu; souvent réduites à une simple ligne de basse et un rythme , ou à des départs de mélodie ou de progression d'accords . Seuls les morceaux nés d'une mélodie (de manière classique) étaient complètement écrits avant d'entrer en studio. .

••• En clair, "Echoes" ne s'est jamais proposé comme du moderne 'africain', pas plus que de la 'new-age' caraïbe, ni d'aucune autre combinaison didactique de genres. Il ne s'agissait pas plus d'une expérimentation. Bien plus prosaïquement, ce n'était que ce que la technologie pré-MIDI me permettait de projeter, partant de mes racines multiples, celles d'un africain né en France, dont le patrimoine culturel allait de Brahms à James Brown, via // etc. Le genre d'éclectisme dont tous mes contemporains étaient tout autant capables que moi.

••• Je tentais de briser les carcans d'une industrie fondée sur les 'catégories', en pure perte inévitablement. 'Hi-Life' fit aussitôt de moi un 'musicien africain', c'est-à-dire un artiste qui, vu ses origines, ne pouvait produire que de la 'musique africaine' quasi-exclusivement (ou: musicien dont l'ensemble de la musique ne pouvait s'apprécier et se juger qu'à travers les canons de la 'musique africaine'). Tandis qu'aux USA et Royaume-Uni, 'Chief-Inspector' me plaçait dans les travées du hip-hop et autres acid-jazz, porté par le phénomène naissant des 'remixes' .

••• Tout cela se produisit à une époque où ce genre d'album – aujourd'hui plus 'classable' – était pratiquement impossible à positionner, compte tenu de la diversité des territoires que je me faisais fort de visiter tout justement: un voyage dont l'enchaînement des scènes avait ceci d'onirique qu'il pouvait paraître brusque et incohérent; ou un film où la scène de la jungle ('Jungle') pouvait se fondre dans une ambiance mi-mélancolique, mi-romantique ('Rain'). "Echoes" était conçu pour n'appartenir à aucun genre. Une bande-originale d'un film virtuel, point.

••• En dehors des milieux black, "Echoes" n'a fait qu'une percée discrète en France métropolitaine, au début. Par contre, à l'aéroport londonien de Heathrow, il m'est arrivé d'entendre l'officier d'immigration me saluer avec un 'Hey ! Mr Chief Inspector est de retour !'. Et l'acceuil en Afrique et aux Antilles était sans comparaison. La source de grandes choses, dans des domaines divers, de manière souvent surprenante. Aujourd'hui encore.

Top page
Page précédente Page suivante

Sun, Jan 3, 2010

wallybadarou.com©2004-2021 / Tous droits réservés